Pour avoir un diagnostic d’autisme, les filles doivent avoir des compétences sociales moins bonnes que les garçons


 

Hannah Furfaro pour Spectrum News, 28 mai 2018 – Traduction : Phan Tom pour l’AFFA
Article original : To get an autism diagnosis, girls need worse social skills than boys

Les files ayant un diagnostic d’autisme évitent souvent de jouer en groupe @Hiva Sharifi/Unsplash

Les filles ayant un diagnostic d’autisme ont des difficultés plus sévères dans la communication sociale que les garçons diagnostiqués, selon une étude basée sur une large population (1).

Les chercheurs ont trouvé que l’inverse est vrai pour les garçons et les filles dans la population générale.

Pour chaque fille diagnostiquée autiste, environ 4 garçons le sont. Mais ce ratio peut refléter en partie un biais dans le processus de diagnostic : les outils utilisés pour examiner et diagnostiquer cette condition sont basés principalement sur des données issues des garçons.

Cette étude suggère que les filles sont enclines à recevoir un diagnostic d’autisme seulement si elles ont des difficultés sociales significatives – soutenant l’idée que les outils de diagnostic ne détectent pas certaines filles autistes.

« C’est assurément un soucis », explique la chercheuse responsable Laura Carpenter, professeure de pédiatrie et de psychiatrie à l’université de médecine de Caroline du Sud à Charleston. « Est-ce que nous ne repérons pas les filles qui sont plus moyennement affectées ? »

Les résultats soulignent également l’existence de différence entre les filles et garçons typiques concernant la communication sociale : les filles peuvent avoir besoin de meilleures aptitudes sociales pour respecter la barre des comportements « adaptés ».

« L’étude apporte une contribution en montrant cette différence de population à grande échelle sur les marqueurs du spectre de l’autisme », souligne Rene Jamison, professeur de clinique agrégé au University of Kansas Medical Center à Kansas City, qui n’était pas impliqué dans l‘étude. « Cela illustre le besoin de prendre en compte les références de groupe spécifiques au sexe. »

Un biais concernant les garçons

Carpenter et ses collègues ont évalué les compétences sociales de 1731 garçons et 1789 filles par rapport à l’autisme, en utilisant le Questionnaire de Communication Sociale (QCS), que les parents ont complété. Ces enfants âgés de 8 à 10 ans, font partie de la South Carolina Children’s Educational Surveillance Study, une enquête sur l’autisme portant sur des enfants nés en 2004 et inscrits dans 123 écoles.

À partir de leurs notes au QCS, les chercheurs ont classé presque 9 % des garçons et presque 5 % des filles comme étant à risque pour l’autisme (enfants dont le score au questionnaire atteint un seuil limite). Parmi ces enfants, 122 ont eu un diagnostic complet. Un échantillon aléatoire de 160 enfants qui n’ont pas eu de classification « à risque » complète également l’évaluation.

Le rapport entre les garçons et les filles qui ont reçu un diagnostic d’autisme est encore plus élevé que celui du groupe « à risque » : environ 25 % des garçons ont reçu un diagnostic d’autisme, comparé à 7.4 % des filles.

Ces résultats sous-entendent que les évaluations diagnostiques sont faussées pour repérer les garçons autistes. Les filles qui reçoivent un diagnostic d’autisme se recoupent clairement avec celles qui ont rencontré le seuil au SCQ – suggérant que l’évaluation est précise pour les filles.

« L’interprétation vers laquelle je vais instinctivement est que les évaluations diagnostiques actuelles sont biaisées contre le phénotype autistique féminin », dit Wiliam Mandy, maître de conférence  à la Clinique de psychologie de l’université de Londres, qui n’était pas impliqué dans cette étude. Les résultats ont été publiés le 30 mars dans la revue Journal of Clinical Child and Adolescent Psychology.

Évaluation du questionnaire

Un point allant dans le sens de cette interprétation est que les filles ayant eu un diagnostic d’autisme ont en moyenne une note plus élevée de 4 points au QCS que les garçons autistes, suggérant que seules les filles ayant des difficultés sévères dans les compétences sociales reçoivent un diagnostic. Plus précisément, les filles tendent  à avoir plus de problèmes de communication sociale, comme jouer en groupe ou sourire (il n’y a aucune différence entre garçons et filles dans les comportements répétitifs et restreints, en contradiction avec des études précédentes).

Les différences dans la communication sociale peuvent être en partie reliées aux défis auxquels les filles font face à l’approche de l’adolescence, dit Marysela Huerta, professeure adjointe de psychologie en psychiatrie Clinique à  Weill Cornell Medicine à New York, qui n’était pas impliquée dans l’étude.

«Il y a un moment où les attentes vis à vis du comportement social des filles en général peuvent être différentes de celui des garçons », explique Huerta.

Les chercheurs ont analysé les questions individuelles du QCS pour déterminer lesquelles sont les meilleures pour repérer les enfants autistes par rapport à ceux qui ne le sont pas.

Les items mesurant les comportements sociaux et spontanés des enfants à l’âge de 4 et 5 ans, lorsque les caractéristiques de l’autisme sont souvent plus visibles, sont les plus pertinents pour prédire un diagnostic d’autisme. Ces questions sont aussi particulièrement pertinentes pour identifier les filles autistes. Par contre, les questions concernant les comportements répétitifs et restreints ne sont pas de bons prédicteurs de la condition autistique chez les filles ou les garçons.

Le QCS apparaît problématique pour évaluer les garçons : environ 10 %  des garçons dont le score au QCS est sous le seuil  « à risque » sont autistes. Cela suggère que les cliniciens devraient être plus attentifs à ces garçons – ou associer l’évaluation avec d’autres tests.

L’équipe de Carpenter a prévu d’étudier les différences de sexe dans les critères de l’autisme parmi les enfants plus jeunes, en utilisant plusieurs outils de diagnostic et d’évaluation.

Référence

(1) Evans S.C. et al. J Clin. Child Adolesc. Psychol. Epub ahead of print (2018) PubMed

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