Les personnes handicapées, 1ères victimes de violences sexuelles, seront prises en compte dans le projet de loi renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes, avec les applaudissements des députés, malgré l'opposition de Marlène Schiappa, secrétaire d'État de l'égalité femmes/hommes.
Le texte de ce projet de loi a été adopté en première lecture par les députés le 16 mai. Il doit maintenant passer au sénat.
Le député Adrien Taquet, LREM, en contact étroit avec Marie Rabatel, présidente de l'Association Francophone de Femmes Autistes, a déposé 2 amendements concernant les violences sexuelles faites aux femmes handicapées, en lieu ouvert et en institutions.
■ L’amendement 232 vise à modifier le Code de l’action sociale et des familles pour renforcer la formation et la sensibilisation des professionnels sur les violences sexuelles, mais aussi sensibiliser les personnes handicapées elles-mêmes à ces questions.
■ L’amendement 231 propose que soit désigné dans tous les établissements et services sociaux et médico-sociaux un référent intégrité physique, qui soit à la fois une personne ressource et un pivot pour accompagner et orienter les personnes et leurs proches pour lutter contre une forme d’autocensure dans les cas de violences sexuelles.
Avis défavorable de Mme Schiappa
Ces deux amendements (exposés par Adrien Taquet le 16 mai) ont reçu un avis défavorable de la part de Alexandra Louis, rapporteure de la commission des lois, et Marlène Schiappa :
« (...) je crois que les dispositions que vous proposez, malgré leur intérêt, n’ont pas leur place dans ce projet de loi spécifique, mais qu’elles pourraient s’inscrire dans le cadre plus global d’un projet de loi de la secrétaire d’État chargée des personnes handicapées, Sophie Cluzel, avec laquelle vous travaillez et l’ensemble du Gouvernement est mobilisé pour mieux protéger les personnes en situation de handicap. À ce stade, pour ces amendements dans ce projet de loi particulier, avis défavorable. » Marlène Schiappa
Incompréhension des députés S Huyghe et S Auconie sur cet avis défavorable
« (...) Inclure dans le texte des dispositifs permettant de renforcer cette lutte se justifie parfaitement aux yeux de notre groupe. Pourquoi continuer d’attendre ? », S. Huyghe (Les Républicains)
« (...) Chacun d’entre nous sait que, dans ces établissements, il y a un vrai combat à mener contre les violences, les agressions et les abus* sexuels. Si ce texte-ci, qui vise à lutter contre les violences sexuelles, n’est pas approprié, quel texte attendons-nous ? » S. Auconie (UDRL)
« Notre démarche, au-delà de ce projet de loi, doit être beaucoup plus intégrée et inclusive. » (A. Taquet)
Le député a pris la parole pour expliquer pourquoi il pensait que ses amendements avaient toute leur place dans ce projet de loi :
« (..) nous défendons, avec le Président de la République, une société inclusive. Cela implique d’arrêter de traiter du handicap dans le cadre d’une politique spécifique et de saucissonner les politiques publiques : il conviendrait plutôt d’intégrer cette dimension dans chacune des politiques publiques. (...) Je trouve dommage, en termes d’affichage symbolique, que l’on renvoie à une politique spécifique, alors que notre démarche, au-delà de ce projet de loi, doit être beaucoup plus intégrée et inclusive. »
Les amendements ont été soumis au vote des députés, qui ont voté unanimement pour.
- Débat sur ces deux amendements avec la Transcription
Adrien Taquet avait déposé un autre amendement (n° CL 230) visant à permettre aux personnes handicapées en institutions de bénéficier d'un examen gynécologique régulier afin de déceler d'éventuelles agressions sexuelles. Cet amendent a été déclaré irrecevable au titre de l'article 40 de la constitution. Nous ne comprenons pas cette irrecevabilité car cet examen aurait bien permis de fournir des preuves d'éventuelles violences sexuelles. Rappelons que de nombreuses personnes vivant dans ces institutions ont des difficultés de communication et n'ont souvent pas les capacités de raconter leur journée par exemple. À titre d'exemple nous citerons cette maman d'adulte autiste avec handicap sévère vivant en institution et qui s'était rendue compte que celui-ci subissait des violences sexuelles (sodomie) à sa façon de marcher "en canard".
De plus il est bien trop fréquent que les femmes handicapées soient sous contraception (sans choix de leur part ni celui de leurs parents), sans réel suivi gynécologique, ce qui pose question sur la raison réelle de cette contraception : serait-ce pour camoufler des possibles violences sexuelles institutionnelles ?
* NDLR en date du 13 juin 2020, rappelons que le mot "abus" est un faux ami traduit de l'anglais, "abuse", mais qui signifie violence. Autant sur l'aspect juridique que social, le mot violence est plus spécifique, juste et approprié. Le terme abus implique en lui-même une notion de petite tolérance (cf. l'abus d'alcool). Or aucune violence n'est tolérée, c'est pour cela qu'elles sont définies et condamnables par la loi.
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