Comment Carly, jeune femme autiste et non-verbale, a trouvé sa voix et sa voie


Madison Rossi pour People Human Interest, 15 novembre 2017
Traduction : Nicole Dupont pour l’AFFA
Article original : 22-Year-Old Nonverbal Woman with Autism on Finding Her Voice and Advocating for Others

Arthur Fleischmann

Carly Fleischmann sait l’importance de la communication car elle a passé une grande partie de sa vie sans y avoir accès.

À l’âge de deux ans elle a été diagnostiquée autiste et atteinte d’apraxie oralo-motrice, ce qui l’empêche de parler. Mais à l’âge de 10 ans, elle a pu communiquer pour la première fois en tapant sur un clavier. Aujourd’hui âgée de 22 ans, elle a trouvé, grâce à la technologie, une voix qui lui permet d’exprimer ses pensées et ses sentiments. Carly Fleischmann est devenue la première personne non-verbale à animer un talk-show ainsi qu’un exemple inspirant pour les autres personnes avec autisme dont elle défend la cause.

« Ma voix est puissante et porte loin », explique-t-elle par email à PEOPLE. « Je peux partager mes connaissances et ma compassion avec des familles confrontées à des difficultés face à leur enfant ayant un trouble du spectre de l’autisme ».

(…)

La jeune femme, originaire de Toronto, raconte qu’elle a compris pour la première fois ce que cela implique d’être non-verbal lors d’un repas de famille, alors qu’elle était une petite fille.

« Mon frère a passé sa commande, ensuite ce fut au tour de ma sœur. Je me souviens avoir moi aussi commandé quelque chose, mais lorsque les plats sont arrivés, mon frère et ma sœur ont eu ce qu’ils souhaitaient alors que l’assiette déposée devant moi ne correspondait pas à ce que j’avais demandé dans ma tête. À cet instant, j’ai réalisé que je n’avais pas de voix. Je ne pouvais dire aux gens que je me sentais mal ou pourquoi je me frappais la tête avec la main pour m’obliger à cesser de faire quelque chose dont je savais que ce n’était pas bien. »

Mais à l’âge de 10 ans, Carly Fleischmann a enfin trouvé sa voix. En commençant par des phrases d’un seul mot, elle s’est mise à demander ce qu’elle souhaitait, quelque chose qu’elle n’avait jamais pu faire auparavant. Finalement, elle a pu partager avec sa famille ses sentiments et ses rêves d’avenir, révélant une personnalité pleine d’entrain.

Cependant, Carly Fleischmann souligne qu’apprendre à taper des phrases sur un clavier a été lent et difficile en raison de ses problèmes de motricité fine.

« J’ai dû travailler dur pour communiquer et épeler. Quand j’ai commencé à taper, je ne pouvais parler qu’avec des phrases d’un seul mot ».

Dès qu’elle a pu commencer à communiquer, Carly Fleischmann a voulu dire à sa mère qu’elle l’aimait. Et elle a décidé de solliciter The Ellen DeGeneres Show pour le lui dire.

« Chaque fois que je tentais d’expliquer à ma mère que je l’aimais, elle m’interrompait ou tentait de deviner ce que j’allais taper sur mon ordinateur. Un jour, alors que nous étions à Los Angeles, j’ai demandé à une de mes amies, Ellen DeGeneres, de dire à ma mère que je l’aimais », raconte-t-elle.

« Il a fallu qu’Ellen DeGeneres me prête sa voix pour exprimer trois petits mots que beaucoup de gens peuvent formuler en moins de 30 secondes. »

Inspirée par Ellen et Oprah (NDLT: Oprah Winfrey, animatrice vedette de télévision américaine), Carly Fleischmann a de nouveau fait la une en interviewant Channing Tatum, en avril 2016, lors de la première diffusion de son propre talk-show: Speechless with Carly Fleischmann. En tant qu’animatrice du premier talk-show non verbal à avoir jamais existé, elle a le talent de poser les bonnes questions et de mettre les personnalités invitées suffisamment à l’aise pour qu’elles se livrent.

Carly Fleischmann sait l’importance de se sentir à l’aise dans son environnement dans la mesure où une chose apparemment aussi simple que d’être assise dans un café l’accable. Les sifflements et les odeurs peuvent provoquer une hyperstimulation, une expérience qu’elle a expliqué dans sa vidéo, « Carly’s Café: Experience Autism Through Carly’s Eyes » (« Le café de Carly: faites l’expérience de l’autisme à travers les yeux de Carly »).

Mais Carly Fleischmann explique que « il y a un déclic dans (sa) tête » lorsqu’elle est à une tribune ou devant des caméras. Elle se sent alors capable de contrôler son corps.

« C’est amusant, me trouver devant une caméra ou un auditoire me met plus à l’aise et détendue », dit-elle. « Il est difficile d’être constamment sûr de soi, je veux dire qu’il est difficile de contrôler mon corps ou de contrôler les éléments qui tentent de me venir à l’esprit. »

De nombreuses personnes avec autisme contrôlent souvent leurs mouvements dans des situations pénibles grâce à des stéréotypies, un comportement d’auto-stimulation consistant à répéter des mouvements ou des sons. Carly Fleischmann se sert de son site web et des médias sociaux comme tribune pour donner des informations sur les stéréotypies et bien d’autres choses. Elle veut que l’on comprenne que l’autisme est une étiquette qui ne peut définir la personne porteuse de ce syndrome.

« Je pense que la plus grosse erreur est de penser que si vous rencontrez une personne avec autisme vous les avez toutes rencontrées, alors qu’en fait, lorsque vous rencontrez une personne avec autisme, vous avez rencontré une personne avec autisme », dit-elle.

« Nous sommes plus qu’une simple étiquette, et s’il faut parler d’étiquettes, j’ai un TOC, une scoliose, un mutisme sélectif et une apraxie oralo-motrice, », souligne-t-elle.

« Et, le pire de tous, le Syndrome de la Beauté », plaisante-t-elle.

À seulement 22 ans, Carly Fleischmann est fière d’avoir réalisé tant de choses dont on n’aurait jamais pensé qu’elle y parviendrait.

Outre d’avoir appris à communiquer, elle a obtenu son diplôme du cycle secondaire et interviewé des personnalités telles que Tatum, Whitney Cummings ou James Van Der Beek, avec une audience de plus de trois millions de téléspectateurs. Elle est aussi l’auteur d’une chanson pour l’artiste country Kaitlin Kozell.

Plus important encore, Carly Fleischmann a inspiré des milliers de personnes en partageant ses connaissances sur ce qu’est la vie avec l’autisme. Elle répond régulièrement sur son site web et dans les médias aux questions de parents et elle trouve sans cesse de nouvelles façons novatrices de partager ses expériences.

Quant à ses projets, elle espère un jour animer son propre talk-show à la télévision, tourner une sitcom basée sur son nouveau scénario et même créer une émission de télé réalité montrant les difficultés de la vie quotidienne d’une personne avec autisme.

« Si je peux donner un conseil aux parents (qui ont un enfant avec autisme), c’est de partir de ce qu’il est. Il a besoin que vous l’aidiez à développer son potentiel, et il peut accomplir plus que vous ne le pensez », assure Carly Fleischmann. « Votre mission est d’aider votre enfant à atteindre le maximum de son potentiel… comme n’importe quel autre parent. Quel que soit le niveau de votre enfant, vous êtes là pour l’aider à trouver sa voix et à apprendre comment utiliser cette voix afin d’améliorer sa vie. »

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