Cet article sur le nouveau formulaire MDPH n’est pas spécifiquement dédié aux femmes autistes mais apportera une aide précieuse sachant les difficultés des personnes autistes pour accomplir les tâches administratives.
«Ce dossier technique présente à la fois la structure du nouveau formulaire, les mécanismes généraux des MDPH, mais aussi le manque de formation de ces institutions concernant l’autisme. Il est important que les personnes autistes puissent accéder aux aides financières et/ou humaines dont elles ont besoin dans leur vie quotidienne, scolaire, professionnelle, en fonction de leur situation individuelle et de leurs difficultés.» Comprendre l’autisme
Nous remercions Phan Tom, créatrice du site “Comprendre l”autisme” et membre de l’AFFA de partager avec nous cet article destiné à éclaircir la démarche pour compléter le nouveau formulaire MDPH, obligatoire depuis le 1er mai 2019.
Sommaire
Les MDPH et le nouveau formulaire : présentation générale et fonctionnement
Les Maisons Départementales des Personnes Handicapées sont chargées de l’accueil et de l’accompagnement des personnes en situation de handicap et de leurs proches.
Leurs missions auprès des personnes et de leurs proches peuvent être catégorisées en quatre domaines :
Les demandes formulées par les personnes handicapées et/ou leurs proches sont ensuite étudiées en Commission des Droits et de l’Autonomie des Personnes Handicapées (CDAPH). Elles ont pour objectifs de :
- se prononcer sur l’orientation de la personne handicapée et les mesures propres à assurer son insertion scolaire ou professionnelle et sociale ;
- désigner les établissements ou services répondant aux besoins de l’enfant / adolescent ou concourant à la rééducation, à l’éducation, au reclassement et à l’accueil de l’adulte handicapé ainsi que statuer sur l’accompagnement des personnes handicapées âgées de plus de soixante ans hébergées dans les structures d’accueil spécialisées ;
- attribuer, pour l’enfant ou l’adolescent, l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé (AEEH) et, éventuellement, de son complément ;
- attribuer la carte d’invalidité (CIN) remplacée maintenant par la Carte Mobilité Inclusion (CMI);
- attribuer l’allocation aux adultes handicapés (AAH) ainsi que la prestation de compensation du handicap (PCH) ;
- reconnaître la qualité de travailleur handicapé (RQTH).
Depuis le 1er mai 2019, un nouveau formulaire MDPH de demande a été mis en place, le cerfa N°15692*01 qui remplace l’ancien formulaire. Ce formulaire était déjà en circulation dans certains départements pour être testé, il est maintenant obligatoire. Même si certaines MDPH laissent un temps d’adaptation durant lequel elles prennent encore en compte l’ancien formulaire, il vaut mieux utiliser le nouveau si vous voulez être sur que votre demande soit prise en compte.
Il est indispensable de le remplir pour accéder aux services et prestations suivantes :
- L’allocation adulte handicapée (AAH)
- L’allocation d’éducation de l’enfant handicapé (AEEH)
- La carte mobilité inclusion (CMI)
- L’orientation vers un établissement ou service médico-social
- La prestation de compensation du handicap (PCH)
- Le renouvellement d’une allocation compensatrice (ACTP et ACFP)
- L’affiliation gratuite à l’assurance vieillesse des parents au foyer
- La reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH)
- L’orientation professionnelle et/ou formation
- Le projet personnalisé de scolarisation et les parcours et aides à la scolarisation.
Il se structure en plusieurs volets :
- l’identité du demandeur, page 2 à 4
- la vie quotidienne, page 5 à 8
- la scolarité ou la vie étudiante, page 9 à 11
- la situation professionnelle, page 13 à 16
- les demandes de droits ou de prestations, page 17 à 18
- la vie de votre aidant familial, page 19
Attention : Il ne faut remplir que les parties pour lesquelles vous êtes concernés. Par exemple si vous êtes en emploi ou en recherche d’emploi, il ne faut pas remplir la partie dédiée à la vie scolaire et étudiante
Le nouveau formulaire MDPH est valable pour :
- pour une première demande ;
- pour un réexamen si la situation a évolué ;
- pour un renouvellement, de préférence 6 mois avant la date d’échéance afin d’éviter une rupture de droit.
[pdf-embedder url=”https://femmesautistesfrancophones.com/wp-content/uploads/2019/06/cerfa_15692-01.pdf” title=”Le nouveau formulaire MDPH”]
La structuration du nouveau formulaire MDPH
Dans le détail, chacun des volets est structuré en sous catégories.
La partie A
Elle se décompose comme suit :
A1 : ce sont des informations générales sur votre identité comme votre adresse, nationalité, lieu de naissance, prestations familiales, organisme d’assurance maladie (CPAM, MSA, RSI)
A2 : il concerne l’autorité parentale et est réservé aux mineurs
A3 : vous avez la possibilité de dire si vous êtes aidé dans vos démarches auprès de la MDPH par un tiers ou une association
A4 : cette partie est à compléter si vous bénéficiez d’une mesure de protection (tutelle, curatelle…).
La partie A5 permet d’exprimer une situation d’urgence : vous risquez de perdre votre logement, d’être déscolarisé, de perdre votre emploi, vous débutez une formation de manière imminente… Les différents cas de figure sont précisés dans l’encadré.
Attention : c’est à la fin de la partie A, page 4 qu’il est indiqué les documents à joindre au dossier et c’est aussi à cet endroit qu’il faut dater et signer, et non plus à la fin du formulaire, comme c’était précédemment le cas.
La partie B
Elle se décompose comme suit :
B1 : ce sont des éléments généraux sur votre vie quotidienne, par exemple où vous vivez et avec qui. Il y a également une partie dédiée aux ressources et aides financières dont vous bénéficiez. A la fin de cette partie, page 6, il y a un tableau concernant les frais liés au handicap et qui reste à votre charge en tant que personne ou proche. Il est important de bien remplir ce tableau si vous êtes concerné. Cela concerne par exemple les aides techniques, appareillages, frais de garde, frais de transport, frais médicaux et paramédicaux non remboursés ou remboursés partiellement par l’assurance maladie.
B2 : cette sous partie comprend les besoins pour la vie quotidienne, les besoins pour se déplacer et les besoins pour la vie sociale.
Les besoins pour la vie quotidienne recoupent les actes du quotidien et concernent notamment les courses, la toilette, l’habillement, la préparation des repas, l’entretien du logement…
Les besoins pour se déplacer concernent aussi bien les déplacements à l’intérieur du logement qu’à l’extérieur. Pour les personnes autistes, les transports peuvent être une réelle difficulté qui n’est pas toujours bien comprise par les MDPH. Il ne faut pas hésiter à préciser par exemple si les transports en commun occasionnent une très grande fatigue et/ou si cela met à mal votre système sensoriel.
Les besoins pour la vie sociale : il y a plusieurs items concernés, notamment les difficultés pour s’exprimer, pour avoir des loisirs, des relations avec les autres. Cette partie est à ne surtout pas négliger pour les personnes autistes qui ont souvent des limitations dans ce domaine, quel que soit l’impact de l’autisme dans la vie quotidienne. Si vous avez besoin de tisser du lien social et que vous êtes isolé, que vous n’avez pas ou peu d’amis, il faut cocher les cases correspondantes dans cette partie.
B3 : cela concerne vos attentes pour compenser le handicap. Il y a dans cette partie, une liste d’aides financières et/ou techniques que vous pouvez cocher selon vos besoins.
C’est aussi dans cette sous partie qu’il y a la possibilité de préciser le fameux projet de vie, en page 8. Si la place allouée est insuffisante, vous pouvez remplir cette partie sur papier libre et la joindre au dossier. C’est aussi à cet endroit que l’on vous demande un certain nombre de justificatif concernant les frais évoqués précédemment.
Le projet de vie est en général difficile à remplir car on ne sait pas par où commencer ni ce qu’il doit contenir. L’objectif du projet de vie est de permettre aux personnes qui instruisent votre dossier et qui ne vous connaissent pas, de saisir les retentissements de votre handicap dans les différentes dimensions de votre vie (travail, vie quotidienne, école si c’est un enfant…). Il faut donc qu’il soit détaillé pour expliquer le mieux possible votre situation et vos objectifs (formations, aménagements professionnels, scolaires…).
L’association Toupi a rédigé un modèle de projet de vie pour un enfant.
La partie C
Elle se compose comme suit :
C1 : concerne des éléments généraux sur la situation scolaire de l’enfant ou de l’adolescent, notamment le lieu de scolarisation. Pour les étudiants il est demandé le type d’étude, le parcours étudiant, les adaptations actuelles, l’emploi du temps.
C2 : elle comprend les besoins de l’enfant/étudiant dans sa vie scolaire en lien avec les apprentissages, la communication, l’entretien personnel, les déplacements.
C3 : il s’agit d’exprimer les besoins de votre enfant pour compenser le handicap à l’école ou demander une orientation en établissement médico social. C’est ici que vous avez la possibilité d’exprimer le projet scolaire de votre enfant.
Attention : il faut bien penser à joindre le formulaire GEVAsco.
La partie D
Elle se compose comme suit :
D1 : des informations générales sur votre situation si vous êtes en emploi, comme le type de contrat, le nom de votre employeur, le temps de travail… si vous êtes en arrêt maladie ou sans emploi, il y a un encadré dédié.
D2 : cette partie concerne votre parcours professionnel, notamment vos différentes expériences professionnelles, votre niveau de qualification, et vos diplômes.
D3 : C’est dans cette partie que vous pouvez rédiger votre projet professionnel, expliquer qu’elles sont vos attentes vis-à-vis de l’emploi. Si vous souhaitez conserver votre emploi expliquer vos difficultés et pourquoi vous souhaitez rester en emploi. Si vous souhaitez vous réorienter et/ou engager une formation professionnelle, il faut expliquer vos choix au regard de votre handicap et de vos capacités.
La partie E
Elle se compose comme suit :
E1 : ce sont les demandes relatives à la vie quotidienne. Elles regroupent les droits et prestations que vous pouvez demander dans ce cadre et qui dépendent de l’âge de la personne (plus ou moins de 20 ans).
E2 : un cadre est prévu pour une expression libre où il faut expliquer les demandes qui concernent la vie scolaire ou étudiante.
E3 : cette partie concerne les demandes liées à l’emploi ou la formation professionnelle, tel que la RQTH, les demandes de formations spécialisées ou encore l’orientation en milieu ordinaire ou protégé.
La partie F
Elle se compose comme suit :
Cette partie est facultative et ne vous concerne que si vous avez un aidant familial, c’est-à-dire une personne ressource qui vous aide dans les activités du quotidien.
F1 : cette partie présente l’identité générale de l’aidant familial (nom, prénom, adresse…), la nature de l’aide qu’il procure (repas, soin hygiène…), s’il bénéficie d’aide pour vous accompagner et s’il est susceptible de ne plus pouvoir vous aider dans le futur (changement de situation, problème de santé…).
F2 : il s’agit de cocher entre plusieurs items pour définir quels sont les besoins de votre aidant : répits, formation, soutien psychologique, reprise d’une activité professionnelle…
Les changements entre l’ancien et le nouveau formulaire
Ce nouveau formulaire MDPH engendre des changements aussi bien au niveau du fond que de la forme :
- l’ancien formulaire faisait 8 pages, celui-ci en fait 20. Selon les MDPH, il ne faut envoyer que les parties qui sont complétées. Par exemple, ne pas envoyer la partie vierge qui concerne la scolarisation pour un adulte qui demande la RQTH.
- un formulaire hybride avec 2 possibilités : 1. Demandes de droits et prestations; 2. Expression des besoins et attentes.
- une approche par grand type de projet de vie selon la structuration du formulaire (la scolarité ou la vie étudiante, la situation professionnelle, les demandes de droits ou de prestations…).
- le portail en ligne : il y a maintenant la possibilité de faire sa demande en ligne avec des identifiants personnels et de suivre l’avancement de son dossier. Pour cela il faut se rendre sur le site internet de la MDPH de laquelle vous dépendez. Les pièces à joindre peuvent être téléchargées directement sur leur site internet et l’ensemble de la démarche est dématérialisée.
- l’ajout de la partie F du formulaire, dédiée aux aidants familiaux, qui prend en compte à la fois leur situation présente, future et leurs besoins
Les pièces à joindre au dossier
Pour que votre dossier soit étudié plus rapidement par la MDPH, il faut qu’il soit complet.
Si ça n’est pas le cas, vous recevrez quelques semaines/mois après l’envoi de votre dossier initial, un courrier précisant qu’il manque des pièces au dossier ou le dossier lui-même qui doit être complété aux endroits où il y a des informations manquantes. Il faudra donc produire ces informations ou les demander (médecin pour le certificat, devis…), les renvoyer, et votre dossier sera étudié.
Pour éviter ces échanges de documents qui retardent l’étude de votre dossier par la MDPH, vérifiez bien une dernière fois avant d’envoyer l’enveloppe que le nouveau formulaire MDPH est complet et que vous avez les documents suivants et faites-vous une check liste :
- un certificat médical de moins de 6 moins, cerfa N°15695*01. Le certificat médical est la pièce maitresse du dossier MDPH. Faites là remplir par un médecin qui connait bien vos spécificités et demandez éventuellement à être présent lorsqu’il le rempli. Idéalement, cela peut être le médecin qui vous a diagnostiqué et qui connait la manière dont vous êtes impacté par l’autisme. Si vous avez des comorbidités reconnues il faut qu’elles apparaissent dans le certificat médical. Il faut bien faire attention à rester dans le délai de validité de 6 mois du certificat médical.
- une photocopie recto-verso d’une pièce d’identité
- une photocopie d’un justificatif de domicile
- une photocopie du jugement de la mesure de protection, uniquement si vous en bénéficiez
- votre projet de vie ou projet scolaire de votre enfant si vous l’avez rédigé sur un document à part
- les justificatifs des frais engagés liés au handicap s’il y en a et/ou les devis des accompagnements futurs. Par exemple si vous ne pouvez pas mettre en place les séances d’ergothérapie faute de moyen, demandez un devis dans un cabinet pour évaluer le montant total à l’année (une séance à raison de 1 fois par mois, ou tous les quinze jours) et joignez-le au dossier.
- le GEVAsco si le dossier concerne un enfant scolarisé
Une fois que vous avez fait tout cela, voici le parcours que va suivre votre dossier à la MDPH:
Il est souvent difficile pour les personnes autistes ou leurs proches de remplir et collecter tous ces documents et de suivre le parcours de son dossier. Vous pouvez vous faire aider par des associations locales, spécialisées dans l’autisme. Celles-ci ont souvent une ou plusieurs personnes ressources qui peuvent vous accompagner dans ces démarches administratives lourdes. Les Centres de Ressources Autisme disposent également parfois d’une Assistante de Service Social qui vous aidera à compléter le dossier. Vous pouvez également vous adresser au Centre Communal d’Action Sociale CCAS ou Centre Intercommunal d’Action Sociale CIAS de votre secteur. Pour cela vous pouvez trouver des informations sur le site internet de votre ville ou de votre intercommunalité. Ils disposent également d’Assistant de Service Social susceptibles de vous accompagner.
MDPH et autisme
Il s’avère qu’en matière de Trouble du Spectre de l’Autisme les MDPH ne sont pas toujours bien (inf)formées, comme en atteste le dossier réalisé par la Caisse Nationale de Solidarité pour l’Autonomie qui précise que ce guide est un outil destiné aux équipes pluridisciplinaires des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH).
Dans le préambule, qui pose les éléments de contexte de la réalisation de ce guide technique, il est rappelé que les MDPH sont mobilisées sur trois axes privilégiés dans le troisième plan autisme :
- faciliter les démarches des familles,
- améliorer l’évaluation des besoins des personnes
- apporter des réponses adaptées aux personnes et à leur entourage
Or, la réalisation de ces missions est complexifiée par le fait que les professionnels des MDPH sont démunis face aux situations impliquant les TSA :
Au regard des échanges avec les équipes des MDPH, des résultats d’enquêtes ayant recueilli et analysé leur expression sur leurs expériences et pratiques, des échanges avec les associations du secteur, il apparaît que les situations relatives aux TSA comptent parmi les plus problématiques à appréhender pour les MDPH.
Le déficit de données scientifiques et les débats que cela a généré jusque récemment sur l’origine et le fonctionnement de l’autisme, a créé un questionnement des professionnels des MDPH sur ce que recouvre exactement ce trouble et sur ses conséquences en matière de limitation d’activité.
Le déficit de compréhension des MDPH en matière de TSA porte sur l’évaluation des situations des personnes, l’élaboration du plan de compensation, l’attribution de prestations et d’orientations adaptées en fonction des besoins des personnes avec TSA.
Malgré le nouveau formulaire MDPH, celles-ci se basent souvent sur des outils originellement conçus pour les handicaps moteurs et sensoriels. Il y a une méconnaissance des difficultés liées à l’autisme, qui ont tendance à être soit surévaluées et mener à une orientation en milieu spécialisé alors qu’un accompagnement en milieu ordinaire est possible, soit à l’inverse à laisser sans solution des profils de personnes autistes en milieu ordinaire qui sont obligées de compenser le handicap par leurs propres moyens alors qu’elles n’ont pas les ressources pour cela.
Sources :
Notice explicative de la MDPH de Gironde
Formulaire MDPH territoire de Meurthe et Moselle
Vidéo explicative du nouveau formulaire de demande à la MDPH CNSA
Dossier technique de la CNSA : Troubles du Spectre de l’Autisme de Mai 2016
Le site internet de l’association Toupi