Le diagnostic d’autisme : « Je savais que j’étais différente, mais je n’ai pas réalisé que j’étais autiste »


Elizabeth Archer pour Express, 7 mai 2018 -Traduction : Flore F. et Alice B. pour l’AFFA

Article original : Autism diagnosis: I knew I was different but didn’t realise I was autistic

Alors qu’elle conduisait en écoutant la radio, Katherine May n’a pas pu en croire ses oreilles. À 37 ans, après une vie entière à pressentir qu’elle voyait le monde différemment des autres, elle a finalement réalisé pourquoi.

Katherine n’a reçu le diagnostic d’autisme qu’à la fin de la trentaine (Photo : Express)

« Une femme autiste était interviewée à la radio et soudainement j’ai compris » dit Katherine, à maintenant 40 ans, écrivain vivant dans le Kent à Whitstable.
« Elle expliquait qu’elle devenait vraiment dépassée par sa sensibilité aux bruits, odeurs et contact physique. Elle mentionnait aussi qu’enfant elle se sentait très isolée et qu’elle a eu des périodes de dépression en tant qu’ado lors desquelles elle se sentait impuissante et c’était également vrai pour moi. Je me suis reconnue dans ce qu’elle disait et j’ai réalisé qu’il se pouvait que je sois autiste aussi. »

Après en avoir parlé à son médecin généraliste et à son psychologue(libéral), les suspicions de Katherine se sont confirmées.
Quand bien même Katherine allait vers ses 40 ans quand elle à découvert qu’elle était autiste, ce n’est pas un cas à part. Les femmes attendent souvent des années ou décennies pour obtenir un diagnostic.
Seulement une personne diagnostiquée autiste sur trois  est une femme ; alors que les hommes sont souvent reconnus pendant l’enfance, les femmes ont souvent un âge assez avancé avant que leurs symptômes ne soient reconnus.

De plus, une étude de la Société Nationale des Autistes (National Autistic Society) a révélé que les femmes et jeunes filles ont plus tendance à obtenir un diagnostic erroné comparé aux hommes.

« Les recherches jusqu’à présent se focalisaient sur des hommes (adulte et enfant). Maintenant nous avons besoin de mieux comprendre l’autisme chez les femmes (adulte et enfant) »
Bien que Katherine se soit sentie toujours différente des autres, personne n’a jamais suspecté quoi que ce soit pour elle.
« Dès l’enfance j’était incroyablement différente des autres enfants, puis durant l’adolescence et pendant ma vie d’adulte. Mais cela m’a toujours mise dans l’embarras. Je n’ai jamais senti que j’avais le droit de voir ma différence d’une manière positive. »

«Même si chaque individu est différent, les femmes sont souvent plus habiles pour masquer leurs traits autistiques, ce qui rend le diagnostic plus difficile »

Carol Povey, de la société N.A.S.

Une fois adulte, Katherine a commencé à se faire des amis mais elle continuait de se sentir différente de ses pairs.
« Si je me rendais à une fête, je finissais par aller me cacher au fond du jardin ou dans les toilettes. Le bruit, les odeurs de parfum des autres personnes et devoir me socialiser avec des gens que je ne connaissais pas était beaucoup trop dur à gérer » admet-elle.


En 1999, elle se marie avec Christopher, 46 ans, informaticien, et en 2012 elle donne naissance à leur fils, Bert.
Mais malgré l’amour profond de Katherine pour son bébé, elle trouvait parfois que les ressentis et attentes en tant que mère étaient trop intenses pour pouvoir y faire face.
« J’ai fait une dépression durant ma grossesse et j’ai vraiment lutté pour faire face aux changements que subissait mon corps. Quand mon fils est arrivé j’ai eu énormément de difficultés pour gérer le bruit et les demandes émotionnelles qu’on attendait de moi. »
Les personnes autistes peuvent être hypersensibles au toucher et parfois Katherine a trouvé difficile de prendre Bert dans ses bras.
« Si quelqu’un me touche je ressens une sorte de choc électrique. Aussi je me suis sentie submergée lors des longs temps où je devais le tenir », dit-elle.

Et se sociabiliser avec d’autres jeunes mamans était émotionnellement épuisant pour elle.
« Pour avoir l’air de faire face à cette situation, j’étais supposée rejoindre des groupes de parents, des garderies associatives (Nb : au Royaume-Uni, il existe des groupes spéciaux – playgroup – organisés par les mamans-elles mêmes, elles se réunissent pendant quelques heures pendant que leurs enfants jouent ensemble) et toutes ces choses que font les autres mamans pour trouver du réconfort. Mais je me suis tenue très éloignée de tout cela. Je trouvais ces concepts absolument horrifiants. »

Quand son fils est arrivé, Katherine a eu énormément de difficultés pour gérer le bruit et les demandes émotionnelles qu’on attendait d’elle

Avant qu’elle ne devienne une maman,  Katherine, partait seule faire de longues promenades quand elle se sentait submergée.
« J’allais souvent marcher avant que mon fils soit né, j’avais besoin de quelque chose me permettant de me plonger dans mon propre espace mental pendant un certain temps, » dit-elle.
« Mais quand je suis devenue mère je me suis sentie comme si je n’avais plus aucun espace pour penser. Tous les moyens que j’utilisais pour me relaxer me sont devenus inaccessibles avec la maternité. »

Cependant, l’idée qu’elle pourrait être autiste ne lui avait jamais traversé l’esprit.
« Ma connaissance de l’autisme se limitait aux personnes qui ne pouvaient vraiment pas communiquer avec le monde extérieur et ayant visiblement l’air handicapé ou différent. J’avais entendu les gens dire des choses comme : « les personnes autistes ne ressentent pas d’empathie et ils ne comprennent pas ce que les autres personnes pensent » Je ne me suis pas reconnue dans tout cela. »

C’est uniquement après avoir écouté une interview à la radio, quand son fils avait trois ans, que cela a commencé à prendre du sens.
« Quand j’ai entendu cette femme décrire ce que signifiait être une femme autiste, j’ai trouvé les explications à ma différence. En réalité les personnes autistes ressentent les émotions de manière très intense et ils peuvent être véritablement submergés par leur sensation d’empathie, ce qui m’est souvent arrivé. »
Pendant des semaines, Katherine ne s’est confié à personne puis elle a finalement dit à Christopher qu’elle pensait qu’elle pourrait être autiste.
« J’étais inquiète il aurait pu être dédaigneux mais il s’est juste arrêté un instant, a réfléchi à la question et finalement a dit : « Oui ça a du sens ».
« Il m’a soutenu à travers tant de différentes phases de ma vie, quand je n’arrivais pas à tenir le coup ou quand je l’obligeais toujours à partir plus tôt des fêtes », dit-elle.
Katherine a parlé de ses préoccupations à son médecin généraliste et son diagnostic a finalement été confirmé par un psychologue.

« J’en suis sortie  en éprouvant de la crainte par rapport à mon entourage. J’étais inquiète que l’opinion des gens ou leurs attentes vis à vis de moi changent. Mais je suis chanceuse d’avoir autour de moi des gens qui ont juste vu cela comme fascinant et m’ont beaucoup questionnée sur le sujet. »

Katherine a le sentiment que son autisme l’a aidée dans sa carrière d’écrivain

En fait, depuis son diagnostic les relations de Katherine avec ses amis se sont renforcées.

« Par exemple, c’est la grande fête d’une connaissance ce soir et je n’ai pas besoin de prétendre que je ne veux pas y aller. Je l’appelle tout simplement et je lui dis : « Je t’aime beaucoup. Sortons pour déjeuner mais je ne viendrai pas à ta fête. » C’est libérateur de pourvoir être plus honnête dans ses relations humaines. »

Son diagnostic l’a aidé à comprendre son rôle de mère également.
« Il n’y a pas eu un seul moment où je n’ai pas absolument adoré mon fils, mais mes difficultés concernaient plutôt ma capacité à supporter l’important changement de vie du au fait d’avoir un enfant. » dit-elle.

Désormais Katherine reconnait que son autisme peut être un cadeau.
« J’accorde réellement de l’importance à la façon dont je vois le monde et malgré le fait qu’il soit très difficile de grandir, j’aime être une adulte autiste. Je fais l’expérience du monde de manière très intense et même si cela peut être tourmentant, c’est aussi merveilleux. Je suis hyperlexique, alors mon cerveau déborde de mots. Je ne pense pas que je serais écrivain si je n’étais pas autiste.
Je ne suis pas sûre qu’un diagnostic précoce aurait été une bonne chose pour moi. Je suis plutôt contente de ne pas avoir subi des tests et des traitements sans fin durant mon enfance et adolescence, » dit-elle.
« Le point essentiel derrière tout cela c’est que si vous remarquez que quelqu’un est différent, acceptez simplement qu’il soit différent et soyez bienveillant avec lui. »

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Commentaire sur “Le diagnostic d’autisme : « Je savais que j’étais différente, mais je n’ai pas réalisé que j’étais autiste »

  • Piriou

    J ai l impression d entendre , quelques détails en moins,l histoire de ma fille Le diagnostic pour elle ,est tout récent,elle a 37 ans.J avoue être un peu destabilisée, j ai 3 enfants ,2 filles jumelles et un fils Depuis un an ,ils fréquentent tous les trois des psychiatres.Pour Marion,le diagnostic troubles autistiques de type Asperger, pour Lauréline dépression avec longue hospitalisation (,troubles bipolaires????)et pour Ronan addiction ,algodystrophie main droite avec incapacité de travailler depuis un an Concernant le trouble autistique, ce serait congénital Voilà beaucoup d interrogations me taraudent